Se Souvenir Des Belles Choses

Confinement Souvenirs

Confinement – Se souvenir des belles choses

Sur la photo maman a mon âge aujourd’hui. Elle a encore dû tomber en rade d’essence. Sur la route de la Fac. Ou de la plage. Et mon père a accouru la ravitailler. Parce que ça le gonfle et qu’il l’adore, il a immortalisé ce énième moment. Jamais il ne la laissera tomber. Elle porte mon collier, offert par mon amoureux. Elle me pique mes affaires et je la déteste. Déjà, à cause d’elle, j’ai dû quitter Paris. Mes amies, mes rêves … Pour la suivre à l’autre bout du monde. Sur une minuscule île. A plus de 16 000 km de ce qui a fait ma vie, 18 ans durant.

Maman

Loin de Paris, elle revit. Elle court 2 heures tous les jours. S’entraîne au marathon. Et fait le tour de Calédonie, à pied, à cheval. 1 fois, 2 fois 10 fois. Rien ne l’arrête. Elle se sent jeune, belle, forte et en pleine santé. Je la trouve vieille et ridicule. Encore plus quand je la croise sur la piste d’une boîte à la mode. Entourée d’hommes qui n’ont d’yeux que pour elle. Nos grosses disputes et chamailleries sont insoutenables. Mon père m’envoie en Australie. Je la déteste plus encore… Se souvenir des belles choses.

Sydney

Là bas isolée, j’apprends l’anglais. Je me mets au japonais. M’inscris à l’université. Partage une collocation avec un jeune loup de la finance et une hôtesse de la Quantas Airways.

Tim se lève tous les matins à 5 heures pour nager dans la piscine naturelle de Bondi Beach. Parfois lorsque je rentre tard, je lui prépare un thé et l’accompagne. La cohabitation est douce, facile amicale, drôle, éducative. En le voyant tous les soirs avec une nouvelle fille, et quand je les entends derrière la porte de leur chambre… J’apprends les dates et ses codes. Je me contente de piquer les produits de beauté de Mary. Bosser et socialiser sur le campus.

Confinement déjà

Parfois, les températures dépassent les 45 degrés. On nous ordonne alors de rester chez nous. Mais ce confinement n’a rien d’angoissant. Personne n’aurait envie de sortir sous des chaleurs pareilles. Surtout pas les femmes du quartier des affaires, obligées de porter des collants blancs ou chairs…

Hippie Chic

Je sors avec un français. J’écris encore à mon amoureux parisien. Mais je sais que c’est fini. Moi la BCBG, je vais aux puces. M’habille dans les friperies. Bois la bière au goulot, teste les vins australiens. Surfe avec les requins. Crame sans protection sous la couche d’ozone percée. Sors tous les soirs et fait l’amour sur ma terrasse. Diplômée, je rentre à Nouméa pour la reprise de la Fac… Se souvenir des belles choses. 

Nouméa

Maman est là. Je la revois clairement. Elle m’attend en pantalon cigarette et chemisier léger. Coté des arrivées. Je me souviens de cette immense joie. L’émotion et les larmes lorsque je l’aperçois … elle qui d’habitude ne vient jamais. Cette impression de rentrer à la maison. Inscrite sur le disque de cire de ma mémoire. Comme les microsillons d’autrefois.

La fin de l’adolescence

Elle m’a réservé la plus grande chambre. Dans la nouvelle villa de l’Anse Vata. Maman est belle, musclée, rayonnante. Elle m’a manqué. Ma crise d’adolescence est passée. La sienne aussi, je crois. Nous ne nous disputons plus et faisons garde robe commune. J’attends le Prince Charmant et je vais le rencontrer. Il me ressemble, on nous pense frère et sœur. Je le vois arriver de loin. Du haut de la cafétéria de la Fac. Jean déchiré et t-shirt vert assorti à ses yeux.

LUI

Je descends à sa rencontre. L’impression de le connaître … Ou le reconnaître. Celui de mes rêves. Coup de foudre à Nouméa. Je me lève tous les matins à 5 heures. Les cours débutent à 7 h. L’après midi, je nage, je cours, dors. Je fait l’amour, pars en Hobie Cat, baise. Apprends mes cours, sors et danse toute la nuit. La vie est facile. Je suis gâtée, heureuse …  Mais je ne le sais pas. Nous sommes si habitués à regarder au loin…. Que nous en oublions ce qui est proche de nous.

Les souvenirs, cela semble tellement commun

Une photo, maman, Nouméa, début des années 90. Et les souvenirs enfouis remontent à ma mémoire. Certainement pas un hasard… En ces temps de confinement, où je crève de solitude. Parce que les souvenirs sont nos réservoirs de bonheur. Ici et maintenant, ils sont le baromètre de notre état intérieur. Je crois que je ne vais pas bien. Mais je sais que ça ira mieux demain. Ecouter parler les souvenirs.

Mélancolie Poétique

« Toi tu disais, C’est pas toujours. Tu disais même, C’est pas ici/C’était la nuit. Tu disais même, Qu’il faisait jour; Toi tu disais, C’est pas l’amour…Tu disais même, C’est pas l’envie, Tu disais. C’est une pause, Un tout petit détour. Où parfois chacun dépose ses souvenirs des belles choses. Toi tu disais, C’est pour toujours. Puis tu disais, C’est pour la nuit. Toi tu disais, C’est un secret. Avoir le même, C’est une idée, Toi tu disais. C’est par amour, Puis tu disais. C’est par ici, Tu disais. Je te propose, Un tout petit détour. Où parfois chacun dépose, ses souvenirs des belles choses. » Gaëtan Roussel 

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